samedi 2 août 2014

Les douze travaux d'Anais



Des lumieres tamisees invitaient la foule rassemblee pour cette traditionnelle rencontre hebdomadaire a abandonner son corps. C'etait bien ca l'objectif. Oublier son corps. Ne. Pas. Parler. Deux heures de mouvements aleatoires dans une foule anonyme, rassemblee la pour experimenter une longue solitude de deux heures rythmee par une musique tantot lente, tantot effrenee.

Bouger sans but precis, pour le simple plaisir de saisir l'espace autour de soi et de lacher prise. La danse est une activite tres consciente: on laisse rarement completement au hasard les gestes qui nous animent. Malgre cette conscience du corps, toutes les cultures du monde ont integre la danse et la musique comme l'un des moyens possibles de franchir le passage vers cet autre monde auquel on croit, peu importe le nom qu'on lui donne.

Une activite consciente mais profondement spirituelle, donc.

Alors que je me trouvais dans ce rassemblement hors du commun, un peu malgre moi car tout ceux qui me connaissent un peu savent a quel point la danse n'est pas mon domaine, j'essayai donc, pour une unique fois dans ma vie s'il le faut, de saisir cet instant et de me preter au jeu. Carpe diem! Soyons fous! Ou est passee mon ouverture d'esprit? Ce serait donc ca, vieillir? Se crisper jusqu'a ne plus pouvoir bouger? Autour de moi s'entrechoquaient des corps inconnus qui faisaient parfois penser a ces spectacles de rock chretien, ou l'audience semble soudainement en etat de transe, deconnectee de notre realite et ayant franchi le pas vers l'au-dela? Ou la folie? Tout temoin ressent un malaise, c'est oblige.

Malaise, donc. Les pensees se succedaient. Comment the hell m'etais-je retrouvee ici, dans cet immense chapiteau en plein air avec toute la jeunesse expatriee d'Ubud, a tenter desesperement de me mettre dans l'etat d'abandon dont dependait ma survie (qui est tres peu commun chez moi, comme je disais)? Une rencontre dans un cafe avec un expatrie allemand au toupet impressionnant, alors que j'etais d'humeur loquace et que j'etais sous le charme d'Ubud ou j'etais depuis 5 minutes. Lorsqu'il m'a propose cette soiree, j'ai accepte parce que j'aurais tout accepte finalement, extasiee comme j'etais. Je vivais une parfaite lune de miel avec la ville, sa spiritualite, sa gastronomie, son esprit. Le coup de foudre. L'envie qui te tripote les entrailles de reporter ton billet d'avion. De l'annuler, pourquoi pas. Un aller simple sur la l... non sur Ubud, s'il-vous-plait!

La realite m'a frappee de plein fouet lorsque l'Allemand au Toupet et sa bande sont passes me prendre le lendemain, me sommant de monter sur le scooter de l'Ami. J'ai su qu'il n'y avait pas de retour possible. J'allais danser. C'etait comme m'annoncer ma sentence a l'issue d'un proces truque, sauf que c'etait moi qui avait truque l'affaire et qui avait decide de ma peine dans un moment d'absence. Danser, pendant deux longues heures. Du moins, je danserais si je survivais au trajet, en sens contraire du trafic et sans casque. Soyons fous.... :-S

Etrangement, sans me faire du bien au dos, j'ai fini par vivre quelques instants de laisser aller, interrompus bien souvent par mon Toupet qui surgissait de nulle part pour s'assurer que sa protegee n'etait pas tapie dans un coin sombre, a l'abri des autres danseurs assoiffes de sang. J'etais la, probablement souriante, surement assez zen. Sa presence encourageante et son aisance me donnaient les moyens de continuer encore un peu.

C'etait ce que je crois etre la derniere epreuve a ma zone de confort de ce voyage, surement la plus difficile pour moi. Eh bien oui, danser pendant deux heures dans une salle bondee d'inconnus me destabilise plus que respirer sous l'eau, passer 5 jours sur un bateau, monter un volcan et dormir dans une poubelle, faire le ramadan, faire ma toilette a l'indonesienne et entendre des rats se battre dans l'entre-toit quand je dors.

Je quitte Bali demain, a contrecoeur. Je me fais la promesse de revenir, et pour un ete complet s'il le faut. D'ici la, je m'empiffre allegrement (quelle bouffe! Quels gouts!) et je tache de ne pas regarder les minutes passer. Je me rassure en me disant que dans deux jours, je serai a Los Angeles chez la belle Melanie et que ce n'est donc pas vraiment la fin de mes vacances...!

mercredi 30 juillet 2014

Splash!

Respirer sous l'eau, ce n'est pas retenir son souffle jusqu'au moment fatidique ou l'on remonte a la surface. Respirer sous l'eau, c'est simuler la vie dans cet espace immense autrement inaccessible. Le corps doit accepter ce non-sens qui n'est permis que par un attirail technique qui n'a rien de naturel.

Mon corps l'acceptait, mais pas ma tete.

Sitot completement immergee, je m'accrochais desesperement a mon detendeur (qui fournit l'air), comme si je n'avais jamais mis la tete sous l'eau de ma vie, comme si je n'avais jamais retenu mon souffle. Premier exercice: l'enlever et le remettre, sous l'eau. Des gestes d'une simplicite honteuse a la surface mais sous l'eau.... Ce detendeur me sauvait la vie et me la compliquait, me plongeant dans l'angoisse que mon corps me trahisse et respire avec un reflexe nerveux de l'eau salee au lieu d'expirer, comme je l'exigeais de lui. Retrouver le controle de sa respiration devrait etre facile pour une chanteuse! Pour une amatrice de yoga! C"est l'anxieuse qui prenait le dessus et qui analysait trop.

"Prends sa main. Regarde-le dans les yeux. Oublie la mer. Oublie l'eau."

Sa main m'a finalement entrainee loin de ma peur de ne pas pouvoir, de ne pas savoir, loin des exercices et des technicalites. Sa main m'a entrainee dans un univers ou je ne suis rien, avec mes craintes et mes angoisses. Ca m'a frappe: quelle absurdite de parcourir le monde et d'etre privee de cet univers grandiose, alors qu'il est juste sous mon nez! J'ai eu cette vision d'un film culte de mon enfance que j'appelais "La sirene qui prenait son bain" a cause d'une scene absolument secondaire, mais bon, c'etait la premiere fois que je voyais des images sous-marines. Je me suis sentie comme Daryl Hannah avec sa queue de poisson, et etrangement, c'est ca qui m'a calmee.

J'etais partagee entre controler mon souffle d'une part, et regarder. Regarder. Et ne pas lacher sa main, surtout pas, quelle catastrophe, je me voyais aspiree dans un trou noir - les trous noirs c'est dans l'espace - non les trous noirs c'est partout si je lache sa main.

J'avais decide de m'en remettre completement a lui et de lui preter temporairement ma vie au moment ou, paniquee, j'avais voulu remonter a la surface et qu'il m'avait pris les deux mains en me sommant de le regarder. J'avais compris que ma vie etait plus en securite entre ses mains qu'entre les miennes. J'etais ma pire ennemie ici.

Au retour, j'ai fondu en larmes. Sans trop savoir pourquoi d'ailleurs. La peur m'avait videe, j'avais honte de ne pas avoir su, tout de suite. J'ai pleure comme un bebe, dechiree entre l'urgence de reussir comme tous ces gens qui en parlent comme si c'etait d'une simplicite effarante, et l'envie de laisser tomber. Partagee entre l'air et l'eau, et la terre ferme. En rester la, perplexe et angoissee, ou y croire encore une fois au moins.

Quand finalement la tempete a passe, quand j'ai arrete d'avoir des sanglots dans la voix a la moindre allusion a mon experience sous l'eau, j'ai ressenti, sortie de nulle part, cette etrange satisfaction d'avoir essaye quelque chose de nouveau et j'ai su que je serais la le lendemain, a 8h, et que j'essaierais de nouveau.

Le lendemain, j'ai fait ses exercices. Je suis restee etrangement calme malgre tous les cauchemars que j'avais fait la nuit precedente. Je suis tombee amoureuse de la mer.

vendredi 25 juillet 2014

Trop d'emotions

*** Avertissement: cette entree va encore parler de ma zone de confort. Je n'y peux rien, on dirait que chaque journee m'extirpe du moindre cocon moelleux de confort que je peux trouver pour me mettre dans une situation inattendue. Fin de l'avertissement. ***

Quand un evenement te sort de ta zone de confort, tu peux reagir de deux facons si l'evenement se reproduit.

Premiere reaction possible: quand tu avais surestime la difficulte potentielle, tu fonces tete premiere, car savoir ce qui t'attend rend l'evenement bien moins stressant.

Deuxieme reaction possible: quand tu avais sous-estime la difficulte potentielle, tu vas probablement tout faire pour eviter que l'evenement se reproduise. Les souvenirs deformant tout, la memoire rendra peut-etre meme l'obstacle insurmontable, meme si au fond, il a deja ete surmonte.

J"adore la mer. J'ai toujours aime les mers agites plutot que calmes. Rester assise sur la berge et regarder les vagues me comble immanquablement de bonheur et peut m'occuper pendant des jours.

En Indonesie, qui est un archipel d'iles, la mer exige que tu deviennes plus qu'un simple temoin passif sur la berge. Tot ou tard, elle t'entraine avec elle et te force a prendre le large.

Le voyage de 5 jours en mer etait un incontournable pour aller voir les dragons de Komodo, plus gros lezard au monde. Pour en voir, on en a vu! En ce periode-ci de l'annee, les komodos se cachent apparemment et sont generalement assez difficiles a apercevoir. On nous avait averti qu'il etait tres possible de n'en voir aucun, donc quelle ne fut pas notre surprise d'en voir 4 directement a notre arrivee sur l'ile! Le voyage en mer avait donc valu la peine.

Le defi, c'etait certainement ce voyage en mer que je classe prudemment dans la 2e categorie citee ci-haut. Comme dirait Cesar: Je suis venue, j'ai vu et j'ai vaincu. J'apprecie la terre ferme et j'ai developpe une toute nouvelle admiration pour les gens qui ont fait de la mer leur gagne-pain, d'une facon ou d'une autre. Je remercie le ciel d'avoir fait de moi une simple enseignante, car je ne crois pas qu'on produise assez de gravols sur cette planete pour que je devienne matelot.

Apres cette merveilleuse aventure que j'appellerai "l'epreuve de l'eau", de retour sur la terre ferme, le repos a ete precipite par le deuxieme defi de taille que j'affronterais cette semaine: l'ascension du volcan Rinjani jusqu'a son cratere (dans mon cas) et son sommet (dans le cas d'Alex). Ca, c'etait l'epreuve du feu. Donc le lendemain du retour en bateau, a 6h du matin, nous etions deja en route pour deux jours en montagne, accompagnes de notre guide et de deux porteurs en gougounes, pour lesquels je voue aussi desormais une admiration sans bornes. Armes d'un minuscule sac a dos (les porteurs s'occupaient de tout le reste) et sept heures de montee plus tard, nous arrivions au cratere situe a 2600m d'altitude ou nous avons du attendre le lendemain pour pouvoir apprecier la vue, etant envahis par les nuages a ce moment. Je dois dire tout de meme que je sous-estimais mes capacites physiques et c'est vraiment pleine de fierte que j'ai assiste au lever du soleil avec un ciel sans nuages. Alex, lui, a voulu pousser davantage en se levant 'a 3h du matin pour atteindre le sommet avant le lever du soleil. Mon homme est tellement genial que meme parti le dernier, il a atteint son objectif parmi les 15 premiers.

Cette experience est entree dans la 2e categorie le lendemain, a la descente. Bien honnetement, j"aurais pu decider de rouler jusqu'en bas de la montagne que je crois que j'aurais eu le corps juste environ aussi meurtri. Si je me trouve blanche comme un drap depuis mon arrivee dans le pays des Indonesiens au bronzage parfait, je dois dire qu'apres cette descente, j'etais aussi brune qu'eux, mais pas pour les memes raisons. J'ai donc egalement place l'experience dans la categorie "been there, done that" et chacun de mes mouvements aujourd'hui me rappelle (encore une fois) toute l'admiration que j'ai pour les guides et porteurs en gougounes qui font le trajet 3 fois par semaine.

C'est promis, je ne me plaindrai pas de mon sort a la rentree en aout! J'aime ma job! J'adore ma job! :)

Alex a entame ce matin son long voyage de retour. Meme s'il part avant moi a chaque voyage estival, je ne m'habitue pas a le laisser partir apres tout ce temps de qualite passe ensemble. Par contre, les prochains jours s'enlignent bien plus relaxes sur les Gilis et je dois dire que je m'en rejouis!

lundi 14 juillet 2014

Le jour où j'ai découvert que j'étais high-maintenance

C'est la Nord-américaine qui parle. Celle qui a besoin de son petit confort, de sa tranquillité et de ses 8 heures de sommeil. Celle qui vit à Montréal dans un bel appartement propre, qui se deplace en vélo et qui fait venir ses légumes bios des fermes sur le toit.

D'abord, je fus choquée pour moi-même. Choquée par Yogyakarta, complètement folle et étouffante. Je ne me voyais simplement pas survivre aux 5 prochains jours, pendant lesquels je finirais assurément renversée par un scooter ou étouffée par une crise d'asthme (sans etre asthmatique). Puis, quand j'ai cessé de me regarder le nombril, je fus choquée par l'environnement dans lequel vivent ces millions de personnes, la densité de population étant impressionnante sur Java. Tout a l'air de fonctionner à pleine capacité: les marchés, les bus, les magasins. Les routes sont congestionnees du matin au soir et c'est toujours le rush hour, partout.

Nous restons dans une petite maison en retrait des boulevards de Yogyakarta, avec une joyeuse maisonnée de colocataires dont l'âge est difficile à estimer. Ici, les gens ont l'air d'avoir entre 15 et 35 ans. Il y a une tranche d'âge qui s'appelle "jeune adulte". Après, impossible d'être plus précis!
Bref, la maisonnée. Niveau de confort frisant le zéro absolu. Une matelas et un oreiller aux odeurs difficiles à decrire. Un bordel apparemment organisé pour celui qui l'a créé et des piles d'albums de finissants qui traînent partout, car on est en presence d'un concepteur d'albums de finissants! La ménagerie comprend également des animaux exotiques (petits et grands lézards) et d'autres qui le sont moins (souris, moustiques et fourmis rouges) qui se font un plaisir de manger la bouffe laissée sur le comptoir toute la nuit.
Et la nuit, personne ne dort. La nuit, c'est tous les amis qui viennent travailler dans cet univers de geeks d'ordi dont la journée de travail commence à 22h.

Finalement, dans tout cela, à travers mon choc de Nord-américaine, quand je me suis habituee un peu à la ville et à la maison, j'ai fini par voir les gens qui nous accueillent: Ganjar, l'air complètement zen et toujours aidant, se faisant un plaisir de nous initier à la culture et la gastronomie locale. Son coloc, Ivan, un guitariste à la voix douce qui ne dort ni la nuit ni le jour, suit en général Ganjar, et a trouvé en Alex un autre fan de musique métal comme lui.

Alors que je faisais mes gros caprices de Nord-américaine hors du luxe et de l'opulence, je me suis rappelée que des gens vivent ici bien plus que quelques jours. Que la faune qui cohabite avec eux n'est pas temporaire. Quils partagent cet espace restreint toute l'année, et que si ça sonne bien stéréotypé, la petite maison en retrait du vacarme des motocyclettes est finalement un havre d'humanité dans l'expérience déroutante de la ville.

(Outre l'expérience humaine et matérielle, nous étions ici pour des raisons essentiellement touristiques évidemment. Nous venions visiter les temples de Borobudur et de Prambanan, situés un peu en dehors de la ville. Le premier est un temple bouddhiste absolument fantastique. Ironiquement, les bouddhistes ne font que 1% de la population indonésienne.
Le deuxième est un complexe de temples hindous avec quelques éléments bouddhistes, à cause du mariage entre un prince hindou et une princesse bouddhiste à l'époque. Cela donne un mélange assez étonnant.)

La partie plus culturelle tire à sa fin, et nous nous envolerons dans deux jours en direction de Lombok, ou le programme est chargé et où nous passerons cinq jours en mer puis deux jours à escalader un volcan.

mercredi 9 juillet 2014

Singapour: oh je te ressens!

Le processus de matantisation bien entamé a cause d'une job à temps plein et la trentaine me guettant, la pensee de cette nouvelle péripétie à l'autre bout du monde me donnait des sueurs froides. Apres l'Europe dans son detail, les Ameriques, le Moyen-Orient et l'Afrique, Alex et moi avons décidé de tenter l'Asie. Les souvenirs de mes périples sud-américain et africain sont frais dans ma mémoire, mais pourtant, ces appréhensions, ces doutes qui empêchent bien des gens de partir me tenaillaient bien avant le départ. Tous ces voyages ne m'avaient donc rien appris?

Puis vinrent les heures d'avion, la bouffe d'aeroport, le décalage horaire, le choc thermique du milieu tropical combiné a l'abus de climatisation : bienvenue à Singapour! Mon expérience de voyageuse ne me sert vraiment à rien: je suis fascinée par ce que je vois, je suis eberluée même, parfois même choquée! Je me sens comme une adolescente qui constate encore une fois (je reste une adulte qui a fait ce constat bien souvent) l'étendue de son ignorance du monde.

Tout ici me fascine: les gratte-ciels tout droits sortis du futur, la culture locale résolument métissée, les règlements qui encadrent chaque détail de la vie collective et les amendes absolument disproportionnées, la culture culinaire qui ne ressemble à rien de ce que je connais déjà malgré deux années de vie commune avec les Indiens de Parc extension. (Et Parc ex ne m'aura pas préparée à Little India, et loin de là! Choc culturel total!) Nos deux hôtes surfent sur cette réalité depuis deux ans, et je ne peux qu'admirer leur capacité d'adaptation!

Soit, Singapour est un peu le New York d'Asie du Sud-Est, le niveau de développement étant absolument extraordinaire par rapport a celui de la région. L'eau est potable, les hawkers (ou la cuisine de rue) sont de bonne qualité, les voitures sont toutes neuves, les gens sont des cartes de mode. La ville est magnifique et il semble que tout ce qui est possible de faire pour améliorer la qualité de vie est fait.

C'est une ville où la culture traditionnelle côtoie la modernité d'une façon que j'ai rarement vue auparavant. Par contre, si Singapour se vante de sa propreté par exemple, on ne peut pas dire qu'elle soit le royaume de l'egalite des chances. Comme dirait mon hôte (interprétation libre): "Singapour n'est propre que parce qu'il y a toujours quelqu'un pour ramasser la crap des autres". Si en général on paie peu d'impôts ici, le système de taxation sur les objets de luxe comme les voitures fait en sorte que les riches paient quand même pour la collectivité quand ils veulent shower-off.

Tout de meme, après 4 jours seulement, j'ai l'impression d'avoir découvert un autre univers et je remets à contribution mon sens de l'observation qui était en veilleuse depuis bien longtemps, profondément endormi dans ma routine quotidienne montréalaise. (Mon sens de l'observation est tellement réveillé maintenant, qu'il "m'insomnise" et m'empêche de reprendre le dessus sur mon décalage horaire de 12 heures. Mon horloge biologique est sans dessus dessous, et je passe d'oiseau de nuit à early bird en 24 heures.) Les odeurs de durian, les nouvelles saveurs à chaque repas, la chaleur humide et le sommeil irrégulier, tout cela fait que Singapour n'est pas qu'une expérience culturellement intéressante, c'est aussi une ville qu'on ressent physiquement.

samedi 10 août 2013

Les aventures de Nanou et Alex dans les uropes.

Une petite entrée de blogue pour donner des nouvelles et pour éviter à quelques malheureux un récit long et ennuyeux de notre voyage.

Ça a commencé dans le froid et la pluie, la Norvège  venue à ma rescousse après avoir avalé trop de smog de Montréal. Des montagnes plongeant dans la mer, un soleil qui semble ne jamais vouloir complètement s'effacer, le crépuscule faisant office de nuit pendant 3h avant que le jour ne reprenne ses droits. Des blonds, partout, grands, tout en muscles, joggant partout et tout le temps, un peuple fier de son héritage, de sa richesse, de son caviar en tube et du coût de la vie absolument hallucinant. J'y ai pêché 3 énormes poissons des bas-fonds des fjords, exploit que j'ai répété à qui veut bien l'entendre pendant le dernier mois.

Puis le Danemark, voisin tout en plaines mais pas moins magnifique, avec sa capitale éclatée, ses habitants hauts en couleur et  nos amies Mette et Anne, qui nous logent, nous initient à la culture locale, à la bouffe danoise, ma foi délicieuse et méconnue, nous présentent des gens chaleureux et tellement serviables. Nous sommes conquis.

Puis un retour en terrain connu pour nous deux: l'Allemagne. Là, d'Hambourg à Munich et en passant bien évidemment par Miltenberg, nous revoyons des visages bien connus, je revis ces quelques moments importants de ma vie où j'ai enfin cerné mes  propres limites, ou j'ai connu celui que j'espère être le père de mes futurs enfants. Nous sommes partout accueillis comme des rois, on mange et on boit tout ce qu'on nous offre et on se réjouit de la baisse importante des prix à la consommation. :)

Puis, retour aux montagnes.

L'ascension durera deux heures. Le poids de nos sacs à dos rend le tout parfois difficile. Je ne sais pas combien pèse mon bagage, mais pendant la montée j'ai parfois l'impression de traîner sur mes épaules mon propre poids. C'est à pic, c'est pénible, Alex essaie de m'aider mais il a aussi son propre stock à monter. Au bout de deux heures, le chalet apparaît, puis plus tard le visage chaleureux de raffaela qui n'en croit pas ses yeux. D'une promesse faite en Afrique à aujourd'hui, il s'est passé un an. "On te l'avait  dit qu'on viendrait, non?"

L'épopée m'a laissé un autre mal de dos en héritage, mais cest bien typique, j'en ai un par voyage.

Les montagnes nous plaisent, et l'été y est plus frais, et ô chance, nous y avons un autre ami: Markus est à Davos, en Suisse, et nous attend à la gare après nous être farcis un voyage de 12 heures.

C'est ma 3e visite à Davos mais la 1e d'Alex. Il est conquis. Markus est un excellent ambassadeur de ses montages et de la cuisine locale. Il nous promène partout, me fait son célèbre risotto et nous rappelle à quel point la suisse est géniale.

Après quelques jours, nous quittons la fraicheur des alpes et nous nous aventurons dans la chaleur étouffante de l'Italie. Ça vaut la peine: Remo, qui nous attend à piacenza, par sa seule présence arrive à nous faire oublier les 40C de température ressentie. Ça lui prendra 5 min, après les retrouvailles, pour arriver à nous faire rire à gorge déployée avec toutes ses histoires rocambolesques!

C'est la 6 e fois que je vais le visiter depuis que je l'ai connu il y a 7 ans, et je comprends bien pourquoi. Alex et moi on tire tres vite une conclusion: c'est l'Italien le plus cool du monde.

Des pâtes, du proscuitto, du vin, amenez-en, l'Italien est complètement obsédé par sa sacro-sainte bouffe et nous le sommes tout autant. Une cuisine assez conservatrice et simple, le mieux étant l'ennemi du bien, nous en avons pour notre argent et nous nous regalons. Nous passons aussi l'essentiel de nos journées à la piscine publique, histoire de survivre à la chaleur!  Puis il y aura Cinque terre et le difficile retour à piacenza, aventure que je raconterai aux intéressés, le départ d'Alex pour Montréal après une nuit d'à peine deux heures, puis un bref passage dans la magnifique ville de gènes, avant mon dernier arrêt, Nice.

Nice, c'est comme un autre monde. On dirait que sous le ciel au bleu intense, la patience n'existe pas, les gens sont émotifs, stressés, voire mélodramatiques, ce qui me fait sourire. La meilleure bouffe au monde, les sels  parfumés, les confiseries, le Niçois est fier mais semble avoir bien du mal à tolérer son semblable. Cette impression me viendra dans le train entre l'Italie et la France, et ne me quittera plus. J'ai aussi le bonheur de retrouver mon amie Valérie, connue il y a 4 ans à Munich, et qui soufflera ses 30 chandelles lundi! C'est une bonne raison de revenir ici pour une 3e fois!

Le retour approche et j'ai une de ces rages de magasinage. C'est l'endroit parfait pour dénicher des cadeaux pour toutes les occasions et je fais des réserves!

Des pensées chargées d'école me reviennent, j'essaie de ne pas penser au boulot qui m'attend à mon retour, avant la rentrée.

En 5 semaines, les nuits se sont dangereusement allongées, les temps a filé sous les  bons soins de ces amis qui la plupart du temps sont trop loin, et cela m'a convaincu qu'il fait bon revoir les mêmes endroits 2 ou 3 ou 6 fois quand c'est pour ceux qui ont marqué à leur façon une époque de notre vie. On se reverra peut être dans 3  ans!

mercredi 15 août 2012

L'essentiel

Le titre me fait penser a une chanson de Ginette Reno. Vous allez comprendre, j'y arrive.

Le periple acheve et au moment d'ecrire ces lignes, j'ai deja fait ma derniere nuit de camping et je suis dans la grand'ville, a Pretoria, capitale administrative de l'Afrique du Sud et ville plus securitaire que "Joburg" ou je dois prendre mon avion de retour.

C'est le temps de la retrospective, de tout noter les souvenirs avant que le temps ne les efface. C'est le temps de raconter l'essentiel, ces raisons pour lesquelles on voyage dans le vrai monde et non pas seulement dans les livres. Ces details qui frappent et destabilisent, qui remettent tout en question, temporairement, trop temporairement, avant de revenir une fois pour toute dans le train-train montrealais.

C'est le temps de les ecrire ici, en esperant que cela vous donne l'envie de venir vivre vous-memes l'experience africaine.

Ce que l'Afrique est:

  • Culturellement riche et passionnante
Nous sommes de complets incultes sur les cultures africaines, et notre ignorance nous a irresistiblement nuit lors de notre sejour. Les nuances, les particularites des vetements et des maisons, les accents, les dialectes, tout cela nous a echappe, confondant tout pour une seule et unique identite, celle de l'Africain, celui qui parle une langue que l'on ne comprend pas et vivant dans une hutte en terre et en paille.

Pourtant, c'est dans la musique, langage universel, que nous avons pu saisir certains traits regionaux distinctifs. La musique entendue a la radio, ou les danses traditionnelles vues au hasard lors du periple ont su nous parler, nous ouvrir une infime fenetre sur la richesse culturelle africaine, cultures en voie d'extinction pour la plupart, avales qu'ils sont par le mode de vie occidental, beaucoup plus commode selon nos standards.

Ceci, meme en ecrivant pendant des heures, meme en etant specialiste de la question, meme en etant Tolstoi (non je suis loin d'avoir termine Guerre et Paix, tome 1), je n'arriverais pas a transmettre l'essence des traditions des tribus croisees sur la route.

  • Vaste
7500km plus tard, Pretty Dirty Bitch n'aura parcouru qu'un territoire infime du territoire africain.

Toutefois, on imaginait un territoire desertique etendu a l'ensemble de l'Afrique, un grand desert blanc, mais nous fumes surpris par la diversite des reliefs, des climats, de la faune, de la flore qui peuvent changer completement sur une distance de moins de 50 km!

Ce vaste territoire nous a rappele les infinies distances sur territoire canadien, car en Namibie la densite de population doit etre equivalente a celle du Quebec, sauf qu'eparpillee sur l'ensemble du territoire.

  • Contradictoire
Partout, c'est le meme paradoxe. Sur la route, on apercoit ces villages de maisons en terre et en paille sur plusieurs kilometres, puis a notre arrivee en ville, l'architecture est resolument occidentale. La difference campagne-ville est plus forte que partout ailleurs sur la planete il me semble.

Plus loin, on apercoit un lodge dont l'architecture est calquee sur celle des villages... aires ouvertes, structures en bois, toit en paille, artisanat local mais luxe infini, le faste et l'opulence, l'homme blanc y est roi et est pret a payer 300 euros la nuit pour dormir sous le toit de paille.

On y voit en plein desert des piscines creusees, des toilettes absolument impeccables.

Le touriste a apporte sa maison en Afrique, sa cuisine, son mode de vie, car il est pret a decouvrir le monde, mais pas a n'importe quel prix. Pas au prix de son confort, ca non.

  • Fondamentalement raciste
Le Blanc ordonne, le Noir obeit. Ce paradigme datant de l'epoque coloniale semble etre toujours tres actuel... dans le tourisme, par exemple. Nous sommes recus comme chez nous et les traits culturels africains acceptes sont ceux qui nous apportent un certain plaisir... la deco, par exemple.

Il existe toujours une division, des endroits frequentes par les Blancs, d'autres frequentes par les Noirs, les Blancs ont peur des Noirs, les Noirs se mefient des Blancs, les accusent de tous les maux.

En dehors du Botswana qui investit plus massivement en education qu'ailleurs (meme que l'Afrique du Sud), il semble que ce constat est la pour rester, car l'education devrait etre l'une des cles, selon moi, pour eliminer ces differences et ces incomprehensions mutuelles.



Ce que l'Afrique n'est pas:

  • Pressee
 La notion du temps est autre et il faut s'armer de patience....... parce..... que....... ils...... sont...... pas..... presses.

Il m'est meme venu a l'esprit a quelques reprises, devant l'air beat de certains employes lorsque je m'adressais a eux "Mais il est completement idiot ou quoi??"

Ca fait partie du deal. Ils sont pas presses. La barriere linguistique y est certainement pour quelque chose, l'absence de structure educative accessible n'aidant en rien. L"anglais est la 2e, la 3e langue de certaines personnes et il est parfois ardu de se faire comprendre.

Par contre, apres avoir echoue a me rappeler seulement du mot "bonjour" en setswana alors qu'on me lk'a enseigne genre 5 fois, je me suis mise a comprendre que ce n'etait pas une question d'intelligence!

Donc on prend notre mal en patience, on explique encore et encore, on se fait repondre quand ca leur adonne et on se rappelle qu'on est chanceux de pouvoir visiter leur pays, car le contraire ne serait pas possible!

L'experience des douanes.... est un souvenir penible qu'il vaut mieux eviter pour pas que je gache ma journee!

  • Une cure de rajeunissemment
 Le sable sur la peau, dans les cheveux, dans la soupe, dans les pates, dans l'eau, l'odeur du sable dans la douche, le sable sous les ongles, le sable dans les souliers, les pieds noirs de sable, l'eau qui coule brune quand on se lave les mains, le sable, le sable, ce partenaire de voyage inoubliable!

Le sable vous vieillit la peau en un clin d'oeil, le sable + le soleil et vous gagnez 20 ans d'age! Des mains noires en permanence, c'est le prix de faire du camping aussi longtemps et de faire la bouffe avec un bruleur qui carbure a l'essence!

Les douches quotidiennes sont tranquillement devenues facultatives, puis un luxe quand je me suis retrouvee seule! Pour ce qui est des vetements propres... eh bien mes jeans marchent tout seuls et sont tout pres de demander a avoir leur propre identite pour participer au prochain recensement. Ils vont prendre le chemin de la poubelle au retour, apres un longue vie de voyages de toutes sortes! (7 ans de loyaux services, ce n'est pas rien!!)

Hier, pour la premiere fois en 27 ans, pour feter la derniere nuit de camping d'une longue serie, je me suis pointee dans un centre de beaute pour recevoir mon premier facial a vie. Et j'ai pris le kit complet: facial super complet, exfoliation des mains et des pieds, traitement a la boue, massage et aromatherapie. Mon budget beaute d'un an y a passe, mais ca a valu la peine alors que j'en vois un seul me juger!

  • Silencieuse
J'ai parle du silence. Le silence des hommes. Mais le silence de la nature, lui, n'existe pas. Le vent dans les branches, les plaintes de l'hippopotame qui ressemblent etrangement a un rire de sorcieres et qui resonnent toute la nuit, le coq, pres des villes, qui se met a crier des qu'il pressent qu'un moment donne peut-etre ca va etre le matin, et les oiseaux qui suivent, qui nous font tout un concert, immanquablement, chaque matin, ou que nous soyons.

Le silence de la nature est bien souvent de mauvais augure, il precede l'attaque d'un predateur et les animaux s'en mefient. Rares sont ceux, chez les humains, qui supportent le silence complet tres longtemps. Il en est de meme chez les animaux.

Les bruits, les sons, ils sont faciles a oublier... particulierement ceux de la nature, qui se cachent si bien derriere l'activite humaine. Son silence est rare mais magnifique. C'est l'un des secrets les mieux gardes sur la Terre... il ne faut que savoir ecouter.

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Je reste avec 3 gars, de jeunes ingenieurs, dans un mignon appartement en banlieue de Pretoria. J'ai quelques projets pour les prochains jours, dont celui de faire du pate chinois pour mes hotes qui s'en regaleront j'en suis certaine, en grands carnivores qu'ils sont.

Je retourne Dirty Bitch demain et je peux vous dire que j'ai le coeur gros... Personne ne sait autant qu'Alex, Rafaella et moi-meme a quel point la Sonic de Chevrolet est une bonne voiture, endurante, stable et solide. Elle devra encore supporter mes frasques de conductrice debutante de transmission manuelle qui doivent certainement lui nuire, mais elle est capable d'en prendre, notre auto!

D'autres nouvelles dans quelques jours!