Le train arrive. Lequel? Il y en a qui vont vers le nord, vers le sud, ou peut-etre que c'est vers l'ouest ou vers l'est. Aucune indication. Aucun tableau qui nous dise ou on s'en va. Dans notre banlieue tout pres du "Eco village" (aucune idee du lien entre la situation de notre hostel et le "eco" du terme), les trains vers Cape town nous semblent aller vers des destinations aleatoires qui nous echappent completement.
Un controleur nous indique que ce train-LA va vers Cape town, vu notre tronche de touriste (savez-vous combien de Blancs il y avait a la gare ET dans le train? Deux. Nous.) On embarque. Ca grince. On se serre le derriere l'un contre l'autre. On se dit que cette chose va surement derailler d'un moment a l'autre.
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Mon homme connait deja Cape town pour y avoir passe 3 semaines avec un ancien crush, et il fait son joe connaissant depuis le debut. Toutefois, son experience de touriste est assez limitee. En effet, Monsieur ne sait pas comment se situer dans la ville, ni trouver les principaux lieux d'interet. Le taxi est de mise. Par contre, en ce qui concerne les principales regles de securite de l'Afrique du Sud, il est tres bien outille.
Regle #1: Ne jamais marcher dehors le soir, meme si tu as 100m a marcher. Tu prends un taxi.
Nous restons en banlieue, le eco village, comme je disais plus tot. La particularite de cet endroit est que les animaux de ferme y sont permis, en pleine ville. Ca veut dire que le matin, on se fait reveiller par des coqs. Le soir, de notre tente, on peut voir une quarantaine de chevaux rentrer au bercail apres avoir vaque a de vagues occupations dans la journee. Dans lhostel, il y a des chats, des chiens, un veritable petit zoo a la salubrite remise en doute mais au personnel tres sympa a l'accent incomprehensible.
En A du S, et particulierement a Pinelands, si tu as faim apres le coucher du soleil,
tough shit. Ou commande une pizza en livraison. Tu mets pas un seul pied dehors a la noirceur, on te promet l'abus sexuel ou le vol a main armee. Donc pas beaucoup d'options pour nous. Si tu es au resto et que tu appelles un taxi, on vient t'escorter jusqu'au taxi pour s'assurer que tu te fait pas assailler dans les 2 metres qui separent la sortie du resto de la portiere du taxi. Ici, ca rigole pas.
Regle #2: S'assurer que le taxi sache ou il s'en va, avant qu'il parte en peur avant de faire 50 fois le tour de la ville avant qu'on realise qu'il a aucune idee de sa destination.
Been there, done that.
Regle #3: Ne jamais prendre les transports en commun.
La question raciale est ma foi toujours presente ici. Un Blanc semble avoir beaucoup de difficulte a faire confiance a un Noir. Ici, c'est frappant: les Blancs sont les clients, et les Noirs sont les employes. Dans les restos du centre, la clientele est blanche avant tout, et TOUS les employes sont noirs. Les differences ethniques et raciales sont marquees, sont soulignees, sont omnipresentes.
Des bidonvilles entourent la ville. On ne parle pas de HLM. On parle de toits en tole, de rues en terre, de brebis dans les rues. (Bon apres le Eco Village, ce n'est pas choquant) Alex me disait que les gens vivant dans les townships n'ont pas d'identite aux yeux du gouvernement. Les recencements ne s"y rendent pas, ainsi le nombre d'habitants de l'Afrique du Sud est toujours un estime. Ces gens n'ont acces ni a un no d'assurance sociale, ni a une couverture de sante, ni a aucune forme d'education. Ils n'existent pas pour le gouvernement sud-africain. Ici, les riches ont tous les droits. Les pauvres, eux, ne sont rien.
Ne vous meprenez pas. A l'epoque de l'apartheid, un Noir prof d'universite pouvait se faire cracher dessus par un concierge blanc. Maintenant, la discrimination est strictement economique, mais on constate que l'heritage historique a laisse clairement un certain groupe au pouvoir, groupe minoritaire en nombre, mais possedant clairement les moyens financiers. Ils roulent en Mercedes, en BMW. Ils ont de superbes condos dans le centre de la ville, en bordure de mer, sur le flanc de la Table Mountain, pres du stade de la Coupe du monde. Ils quittent leur maison par le garage super securise, traverse la porte de la cloture surmontee de barbeles, se rendent ainsi a leur destination en toute securite et ne mettent jamais le pied dehors.
C'est cette classe sociale qu'Alex a connu lors de son dernier passage a CT.
Cape town est une ville magnifique, qui vit au pouls du lever et du coucher du soleil et qui condamne tout etranger a se faire crosser par tous les chauffeurs de taxi a perpetuite a la nuit tombee.
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Aucun tableau qui indique le quai du train pour Pinelands, dis-je.
Valse hesitation quant a la possibilite de demander notre chemin a quelqu'un parce que tout le monde le sait, ce sont tous de dangereux criminels qui prennent le train.
"Oui mais mon amour, sinon ca se peut qu'on se rende jamais."
Alors voila, on demande. On pile sur notre racisme d'occasion.
Premiere chose qu'on sait, c'est qu'on commence une belle conversation avec un monsieur a propos de notre voyage en Namibie, il nous donne des conseils sur les routes, sur notre itineraire, resouds certains problemes qu'Internet n'avait pu resoudre, et puis 2 personnes se joignent a la conversation, et cela en s'assurant que nous descendrons bien a Pinelands au moment venu.
On s'est trouve stupides de douter autant, d'embarquer dans cette mefiance plus ou moins fondee. Ca a ete liberateur de faire confiance.
A notre arrivee a Cape town, on se serrait les fesses l'un contre l'autre en evitant d'attirer trop l'attention. A notre depart, on s'est senti comme les rois du train.
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A venir: samedi, depart vers la Namibie!! Beaucoup, beaucoup de kilometrage a venir.