mercredi 29 octobre 2008

"Et la mer efface sur le sable..."

* Musique: Moscas en la casa, Shakira


···· Fiche papa ····

Lieu: Plage de Paloma, Uruguay
Altitude: Niveau de la mer (... ca vous etonne? hihi! Ma mere ce matin m'a justement demande a quelle altitude on etait! "Au niveau de la mer, ma belle maman!")
Activites: Eh bien, ca depend. Dormir. Manger. Faire des dessins dans le sable et attendre avec une impatience presque malsaine que la mer les efface. Je continue aussi la traduction de mon livre de Julio Cortazar, mais pour me reposer de ce travail intellectuel ardu, je lis "Che Guevara pour les debutants".
Duree du sejour: Une semaine au total en Uruguay
Destination suivante: Mendoza... et la Cordilliere des Andes. (et apres on va a Cordoba j'ai hate j'ai hate j'ai hate!!) ;)

···················

Chaque fois que je me retrouve seule sur une plage, je pense a ce personnage de roman, ce peintre qui tentait desesperement de peindre l'ocean... (Ocean Mer, Alessandro Barrico)

Un homme face au rivage, seul. Sa toile est completement blanche... il peint avec de l'eau salee. Il tente de trouver "les yeux de la mer".

Lorsque j'ai lu ce livre il y a 2 ans lors de mon voyage au Portugal, j'ignorais qu'il me suivrait chaque fois que je serais seule sur un rivage, quelque part dans le monde. J'essaie toujours de m'imaginer ce peintre solitaire devant moi, puis je le vois remonter dans sa barque et disparaitre a la tombee de la nuit.

Il existe sur la Terre des millions de kilometres de côte. Pourtant, chaque fois que l'on se retrouve sur une plage deserte, c'est comme si la plus grande des faveurs divines nous avait ete accordee. C'est la beaute, le calme, le bruit des vagues offert sur un plateau d'argent.
La paix.
Ce moment aura une place de choix dans la categorie beau-souvenir-ou-me-refugier-quand-les-histoires-de-job-m'ennuient-a-mourir-ou-que-
quelqu'un-me-dit-d'etre-raisonnable-et-de-commencer-a-me-magasiner-un-condo-ou-de-
me-trouver-un-chum-serieux-bon-sang-anais-il-faut-se-caser-et-travailler-c'est-ca-
la-vie-reelle.

Les voyages sont la partie frivole de la vie des gens sérieux, et la partie sérieuse des gens frivoles. - Anne Sophie Swetchine

L'arrivee de ma maman m'a fait gouter un peu au Quebec, apres avoir passe plusieurs mois sans contact direct avec ma petite patrie. Elle est arrivee ici le sourire au levres, prete a s'eblouir devant les tres jolies villes sud-americaines et l'excellente bouffe, et le nez prepare a detecter (helas!) toutes les mauvaises odeurs qui oseraient s'en approcher! De voyager avec elle me rapproche de la maison... J'ai desormais acces a de supers luxes auxquels je n'etais plus habituee: une mere (ouioui! c'est tout un changement ca!), un sechoir a cheveux, un micro-ondes et meme une television! Apres etre restee dans des shitholes, je vous le dis, c'est une reelle difference!
Nous passons de bons moments. Elle a completement change sa vision de l'Amerique du sud ou elle ne pensait jamais mettre le pied. Elle croit maintenant ce que je lui ai dit et repete pendant des mois pour la convaincre: la vie ici est facile et belle.

Je vous dis la meme chose. J'ai eu des courriels de plusieurs personnes qui me disaient que j'etais dont chanceuse de faire ce voyage... Voyager, ca prend de l'argent, vous dites? Assurement! En Europe et au Japon peut-etre davantage, parce qu'il n'est pas plus cher de voyager en Amerique du sud que de vivre dans la ville de Quebec.
Cette chance-la, on la prend. Tout est toujours une question de choix et de priorites.

De toute facon, nous ne sommes toujours que de passage.

mercredi 22 octobre 2008

Hommage au meilleur de l'Argentine

* Musique: Por una cabeza, Carlos Gardel


... le tango

Une femme attend dans un coin sombre, la tete legerement baissee. Elle attend qu'on lui lance un regard, qu'on leve sensiblement le sourcil en sa direction. Celui qui l'invitera a la prochaine danse pourra la garder ou la jeter...

Lorsque le signal est lance, les partenaires se trouvent, s'enlacent, s'affrontent et se cherchent a la fois. Ils suivent le rythme sensuel de Carlos Gardel, chanteur de tango mythique plusieurs fois imite... mais vous le devinerez, jamais egale. Les Argentins disent que le tango appartient a lui seul, d'une certaine facon.

C'est une dance nee dans les maisons closes au 19e siecle, alors que les immigres europeens fraichement arrives a Buenos Aires, eloignes de leur famille, cherchaient la un peu de reconfort aupres des prostituees... Incroyable qu'une danse aussi sophistiquee soient nee dans des milieux aussi defavorises et enfumes, non? Il est d'ailleurs difficile d'aller a Buenos Aires sans passer par la Boca, quartier ouvrier un peu crad qui en serait le lieu de naissance. Encore aujourd'hui, il est decommande d'aller y faire sa promenade en pleine nuit...



... l'histoire de la Difunta Correa

Deplacons-nous dans la precordilliere des Andes.

Un homme malade. Une jeune mere et un bebe.

D'apres la legende, l'homme est enrole par l'armee lors de la guerre civile. Connaissant l'etat de sante precaire de son mari, Deolinda Correa suit son bataillon qui traverse le desert de San Juan en transportant des vivres, de l'eau...et leur nouveau-ne.

Au bout de quelques semaines, elle arrive au bout de ses reserves et meurt d'epuisement. Des muletiers retrouveront plus tard son cadavre au milieu des dunes de sable. Et miracle! Le bebe tete toujours le sein de sa maman.

La mythique Difunta Correa fait partie de l'imaginaire collectif. A plusieurs endroits dans tous le pays, des petits autels lui sont dedies sur la route. Parmi les offrandes, on place des bouteilles d'eau, qui serviront peut-etre a etancher sa soif.

(j'adore cette histoire :))



... le dimanche

Difficile de ne pas se frustrer quand on realise qu'on a besoin de quelque chose de facon urgente et que tout est ferme. C'est ca le dimanche en Argentine.
Personne dans les rues.
Le calme plat... apres et avant la tempete des autres jours de la semaine.
Ou sont-ils, tous ces Argentins?

Il se retrouvent en famille, dans la montagne, armee d'un 1/4 de boeuf, et ils perpetuent cette incontournable tradition de l'asado!! Partout, cette odeur de brule plane et agace la narine... meme une non-carnivore comme moi n'y resiste pas! On en oublie ces deux ou trois trucs de pharmacie dont on avait supposement besoin!

(incroyable mais vrai! j'adore desormais le dimanche!)


... son immense territoire

Ce qui est merveilleux avec ce pays, c'est qu'on n'aura jamais termine de l'explorer de long en large, de la cote aux sierras, du desert a la foret fuegienne! Des milliers de kilometres! J'y passerais ma vie si ce n'etait de leur gouvernement merdique ultra-corrompu et du tres peu de respect pour l'environnement de ses habitants! Le Canada me donne legerement moins de sueurs froides!


... Tito

La meilleure rencontre que j'aie pu faire.
Autant pour l'etat de mon espagnol, que pour la qualite de mon voyage, que pour ma comprehension de la culture, que pour mon enrichissement personnel!!
C'est dommage car il ne le sait pas, il lui manque encore de pouvoir parler francais pour lire ce blog... mais tous les jours, je vous jure, je lui dis merci.

(je l'adore lui!!)

mercredi 15 octobre 2008

Promenade sur Mars

* Musique: The End, The Doors


Fiche papa (ou technique!) :)

- Lieu: Salar d'Uyuni, sud-ouest de la Bolivie
- Altitude: 4000m a 5000m au-dessus du niveau de la mer
- Activites: Visite de l'immense desert de sel, route des lagunes "de couleur", 2 nuits dans un hotel de sel, decouverte de l'etrange monde de Dali...
- Duree du sejour: 4 jours
- Destination suivante: Cordoba, mon "chez-moi" sudamericain!

Je vous espionne de ma fenetre, promeneuse qui avez un chien...
Vous et le chien vivez sans doute sur une autre planete...



Malgre la musique tres derangeante de notre chauffeur qui joue a repetition depuis 2 jours, ce sont les premieres notes qui me sont venues a l'esprit en voyant l'eau rougeatre de la Laguna Colorada, aspirante au titre tres convoitee de "merveille du monde naturelle". Alors que j'essaie de me rememorer des paroles exactes de la chanson d'Offenbach, le vent fouette mon visage. C'est lui qui rend l'eau encore plus rougeatre. Spectacle tout-a-fait etonnant.


La longue route et les nuits froides m'ont donne l'impression de voyager sur la Lune, sur Mars, sur Venus... je ne sais pas, mais pas sur la planete bleue. On imagine la Terre couverte de forets luxuriantes, d'eau, de neige meme (Quebec oblige!)... mais les deserts, on oublie trop souvent les deserts, l'air sec, le sable, l'absence de vie humaine sur des kilometres. J'ai passe maintenant tellement de temps dans le desert que je vous le confirme: il existe d'immenses territoires inhabites sur cette planete.


... Ou l'homme que je suis quoiqu'il en pense n'a pas acces... ni de pres... ni de loin...


(Pensee rapide: j'ai ecoute de force dans le train le film "I am legend" avec Will Smith et ca m'a fait faire des cauchemars. Le positif dans tout ca, c'est que tout de suite apres, j'ai decouvert ici le lieu parfait pour me cacher de la race humaine potentiellement devenue zombie sanguinaire. Je me fais une hutte et je vis en Bolivie au milieu des lamas. Voila. Fin de la pensee rapide.)

Cette expedition ultra-encadree fut extremement agreable, mais egalement la derniere etape de mon copinage avec Mani l'Autrichien, avec qui j'ai passe les 5 dernieres semaines. Les adieux furent brefs mais arrache-coeur... Mais quelle braillarde je fais! Moi qui pensais etre bien au-dessus de l'attachement, moi qui pensait bien me tirer de toute relation qui s'efface aussi vite qu'elle s'est construite! Eh bien j'etais la a me vider de mes larmes, me bourrant de chocolat affectueusement donne par une comparse de l'expedition qui crut, avec raison, que c'etait le temps d'un peu de solidarite feminine! Je ne regrette en rien ma vie temporaire de SDF (sans domicile fixe), mais je vous dis une chose: sachez apprecier les gens qui vous entourent et surtout le fait qu'ils RESTENT pres de vous. (ca exclut le fait que je parte tout le temps ca, d'accord?)

Je suis de retour en Argentine maintenant, chez Tito qui me prete son appartement en son absence pour la fin de semaine. Je vais faire le plein de soleil, de viande et de yogourt probiotique! Parlant de faire le plein, le plus bel Argentin du monde trouve que j'ai maigri durant mon sejour... ce qui ne m'etonne pas, etant donne mon etat physique plus ou moins ideal des dernieres semaines. Je vais me payer de petites vacances de mes vacances! :D

Aussi, tres bientot, dans moins d'une semaine, petite maman vient faire son tour dans l'hemisphere sud et j'irai la chercher a Buenos Aires. J'ai hate de la voir, j'ai hate de la voir arriver avec son chapeau soleil et ses lunettes fumees! C'est le printemps ici, les paysages verdissent, c'est moins sec, enfin! Je vais pouvoir sortir mes sandales sans que tout le monde me regarde avec des yeux ebahis! (pour eux, avant le 21 septembre, il est physiquement impossible de mettre des sandales, peu importe qu'il fasse 15 ou 40 degres!)

Vivement l'ete!!

mercredi 1 octobre 2008

Somewhere, en cualquier lugar

* Musique: Unintended, Muse


La tete dans les nuages.

Seule, encore et toujours, ou plutot en tete-a-tete avec le dieu-soleil qui s'eclipse apres une longue journee.

Si l'on en croit une legende inca, il serait ne en ce meme lieu ou je le regarde disparaitre. Autour de moi, un lac sacre, une merveille naturelle, une ile perdue au centre de nulle part ou au milieu de tout. Le vent me chuchote a l'oreille les croyances toujours vives des habitants de l'ile, et je me laisse bercer par la lumiere.

Soudain, il fait froid. Je dois partir.
Il est disparu derriere les montagnes mais je sais qu'il reviendra.

J'ai longuement pense a l'absence. A vous, qui etes loin. Ou peut-etre est-ce moi qui est loin?

A mon retour de l'ile, il y a cet ami, qui semble parfois mieux me connaitre que moi-meme, qui m'ecrit ces mots dont j'ai besoin.
"Je sais que tu m'entendras même quand tout l'univers se tait autour de toi", ecrit-il, alors que mes yeux s'emplissent de larmes. Je peux presque sentir ses bras autour de moi, son souffle dans mon cou. La Bolivie ou le monde, ou l'univers, quelle importance? J'entends distinctement les belles melodies de sa guitare, je le sens vivre a mon rythme, et moi je vis a son rythme.

Si l'on ressent tellement la distance entre nous et une personne absente, peut-etre devrions-nous nous poser quelques questions...

Est-ce elle qui est partie?
Ou est-ce moi qui ne l'a pas suivie...?

Je ne ressens ici l'absence de personne. Je suis complete et parfaitement heureuse. Les priorites sont ce qu'elles doivent etre, toute chose a sa place bien precise, les gens, la langue, nous faisons tous partie de la meme planete, nous cherchons tous a repondre aux memes questions. Il n'y a ni peur, ni inconnu. Les liens se tissent facilement et se defont aussi, en laissant une trace indelibile.

C'est peut-etre un autre monde, bien different de celui dans lequel j'ai grandi. Mon monde a moi est magnifique, unique, c'est "chez moi", mais j'apprecie celui dans lequel je flotte depuis quelques mois. Il n'est pas sans danger, il est parfois choquant, sale, destabilisant... mais il est vrai, indiscutablement vrai. Sans colorant, ni additifs. La race humaine pour le meilleur et pour le pire. A mon retour, tout ceux que j'aime auront change avec moi. Je les regarderai avec de nouveaux yeux. Et je sais que je ramenerai avec moi une petite partie du monde dans lequel j'aurai vecu...

Ceux qui voudront me voir telle que j'etais pourront le faire, je reste moi, irresistiblement moi.
Toutefois, ceux qui sauront percevoir ce petit quelque chose de different seront ceux qui auront voyage avec moi tout ce temps... Voila pourquoi je ne ressens aucune absence, aucune solitude.

Alors que je m'apprete a poursuivre mon chemin vers le sud de la Bolivie, vers d'autres immenses et aveuglants deserts, j'ai besoin qu'on me fasse confiance. Qu'on me laisse partir. J'ai besoin qu'on arrete de me dire de faire attention, d'etre raisonnable. Je sais exactement ce que je dois faire, ou je dois etre. J'ai, pour la premiere fois de ma vie, pleinement confiance en moi.